ATTENTION :

ce cours correspond au programme de 2013, il n'est pas conforme au programme de terminale de SES en vigueur depuis 2019.

3. Comment les banques amplifient l'instabilité : le cycle du crédit

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En faisant crédit, les banques distribuent du pouvoir d'achat : aux entreprises pour qu'elles investissent, aux ménages pour qu'ils consomment. Cette activité est nécessaire à la croissance, elle permet d'assurer à l'offre les débouchés nécessaires sans attendre que les revenus de la production (salaires ou bénéfices) aient été distribués. Mais cela permet aussi au pouvoir d'achat d'évoluer indépendamment des richesses produites, et donc de créer des décalages entre l'offre et la demande.

En faisant crédit, les banques distribuent du pouvoir d'achat : aux entreprises pour qu'elles investissent, aux ménages pour qu'ils consomment. Cette activité est nécessaire à la croissance, elle permet d'assurer à l'offre les débouchés nécessaires sans attendre que les revenus de la production (salaires ou bénéfices) aient été distribués. Mais cela permet aussi au pouvoir d'achat d'évoluer indépendamment des richesses produites, et donc de créer des décalages entre l'offre et la demande.

3.1. En période de croissance, les banques sont incitées à distribuer abondamment les crédits.

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Lorsque la croissance économique est assez forte pour permettre une hausse du revenu par tête, les débouchés augmentent pour les entreprises : il y a une plus forte demande à satisfaire. Cet accroissement de la demande suscite des projets d'investissement des entreprises qui doivent s'équiper pour produire plus, et formulent donc des demandes d'emprunt. De leur côté, les consommateurs, du fait de la hausse des revenus, sont aussi incités à emprunter pour financer de gros achats (logement, automobiles, équipement, …) qu'ils n'oseraient pas faire dans un contexte économique moins favorable. Dès lors qu'il existe des projets d'investissement a priori rentables, les banques sont donc conduites à prêter l'argent nécessaire à leur financement : les entreprises ont toutes les chances de pouvoir rembourser l'argent emprunté grâce à la hausse de la demande qui favorise l'accroissement de leur chiffre d'affaires. De même, la hausse des revenus garantit que les consommateurs pourront rembourser leurs emprunts. La faiblesse du risque de non remboursement des emprunts et la hausse de leur bénéfice incitent les banques à prêter à des taux d'intérêt plus bas que d'habitude. En effet, le taux d'intérêt sert en partie à couvrir les pertes qu'un prêteur subit du fait des défauts de ses débiteurs : si le risque de défaut est faible, alors le taux d'intérêt peut diminuer. Mais la baisse des taux d'intérêt incite en retour les entreprises et les consommateurs à augmenter leur demande d'emprunt auprès des banques et de plus en plus des projets plus risqués : la baisse des taux d'intérêt rend l'achat d'un logement ou d'un équipement industriel plus intéressant. Et cette hausse des investissements et des gros achats des ménages va en retour générer de la croissance puisqu'il faudra produire les biens ainsi demandés. La croissance économique a donc entraîné une augmentation des emprunts qui relance en retour la croissance. L'activité bancaire a donc clairement servit d'accélérateur de la croissance.

Lorsque la croissance économique est assez forte pour permettre une hausse du revenu par tête, les débouchés augmentent pour les entreprises : il y a une plus forte demande à satisfaire. Cet accroissement de la demande suscite des projets d'investissement des entreprises qui doivent s'équiper pour produire plus, et formulent donc des demandes d'emprunt. De leur côté, les consommateurs, du fait de la hausse des revenus, sont aussi incités à emprunter pour financer de gros achats (logement, automobiles, équipement, …) qu'ils n'oseraient pas faire dans un contexte économique moins favorable.

Dès lors qu'il existe des projets d'investissement a priori rentables, les banques sont donc conduites à prêter l'argent nécessaire à leur financement : les entreprises ont toutes les chances de pouvoir rembourser l'argent emprunté grâce à la hausse de la demande qui favorise l'accroissement de leur chiffre d'affaires. De même, la hausse des revenus garantit que les consommateurs pourront rembourser leurs emprunts. La faiblesse du risque de non remboursement des emprunts et la hausse de leur bénéfice incitent les banques à prêter à des taux d'intérêt plus bas que d'habitude. En effet, le taux d'intérêt sert en partie à couvrir les pertes qu'un prêteur subit du fait des défauts de ses débiteurs : si le risque de défaut est faible, alors le taux d'intérêt peut diminuer.

Mais la baisse des taux d'intérêt incite en retour les entreprises et les consommateurs à augmenter leur demande d'emprunt auprès des banques et de plus en plus des projets plus risqués : la baisse des taux d'intérêt rend l'achat d'un logement ou d'un équipement industriel plus intéressant. Et cette hausse des investissements et des gros achats des ménages va en retour générer de la croissance puisqu'il faudra produire les biens ainsi demandés. La croissance économique a donc entraîné une augmentation des emprunts qui relance en retour la croissance. L'activité bancaire a donc clairement servit d'accélérateur de la croissance.

3.2. Mais le développement des prêts accroit l'inflation et les risques de non remboursement.

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Une distribution de crédit trop généreuse peut conduire à une hausse de la demande si rapide que l'offre ne peut plus suivre – faute de facteurs de production disponible, faute de matières premières… La demande s'accroissant plus vite que l'offre, les prix commencent alors à augmenter sur les marchés de biens et services, et plus particulièrement sur les marchés des facteurs de production ou de matières premières qui font défaut aux entreprises. Mais alors que le démarrage de l'inflation devrait être le signe qu'il faut stimuler l'offre plutôt que la demande, elle peut paradoxalement avoir – momentanément – l'effet inverse. En effet, l'inflation qui se généralise permet aux entreprises d'augmenter leurs prix sans trop souffrir de la concurrence, elle accroît certains revenus, notamment ceux du secteur commercial ou de ceux qui « spéculent », c'est-à-dire achètent dans le but de revendre plus cher grâce à la hausse des prix. Il y a donc une demande de crédit qui devient rentable grâce à l'inflation (plutôt que grâce à une augmentation de la production), et parfois même très rentable, incitant ainsi les banques à continuer de prêter. Et les nouveaux prêts alimentent en retour la hausse de la demande qui fait flamber les prix. Cependant, ce mécanisme accroît parallèlement les risques, car la capacité à rembourser des emprunteurs dépend de plus en plus d'une accélération de la hausse des prix, laquelle dépend d'une hausse de la demande qui suppose que les banques continuent à distribuer de plus en plus de crédits. L'enrichissement des emprunteurs est de moins en moins fondé sur la création de biens et services, et de plus en plus sur une inflation que personne ne maîtrise.

Une distribution de crédit trop généreuse peut conduire à une hausse de la demande si rapide que l'offre ne peut plus suivre – faute de facteurs de production disponible, faute de matières premières… La demande s'accroissant plus vite que l'offre, les prix commencent alors à augmenter sur les marchés de biens et services, et plus particulièrement sur les marchés des facteurs de production ou de matières premières qui font défaut aux entreprises.

Mais alors que le démarrage de l'inflation devrait être le signe qu'il faut stimuler l'offre plutôt que la demande, elle peut paradoxalement avoir – momentanément – l'effet inverse. En effet, l'inflation qui se généralise permet aux entreprises d'augmenter leurs prix sans trop souffrir de la concurrence, elle accroît certains revenus, notamment ceux du secteur commercial ou de ceux qui « spéculent », c'est-à-dire achètent dans le but de revendre plus cher grâce à la hausse des prix. Il y a donc une demande de crédit qui devient rentable grâce à l'inflation (plutôt que grâce à une augmentation de la production), et parfois même très rentable, incitant ainsi les banques à continuer de prêter. Et les nouveaux prêts alimentent en retour la hausse de la demande qui fait flamber les prix.

Cependant, ce mécanisme accroît parallèlement les risques, car la capacité à rembourser des emprunteurs dépend de plus en plus d'une accélération de la hausse des prix, laquelle dépend d'une hausse de la demande qui suppose que les banques continuent à distribuer de plus en plus de crédits. L'enrichissement des emprunteurs est de moins en moins fondé sur la création de biens et services, et de plus en plus sur une inflation que personne ne maîtrise.

3.3. L'augmentation du risque pousse les banques à augmenter les taux d'intérêt.

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Si l'inflation rentabilise les demandes d'emprunt, elle accroît donc progressivement le risque de défaut, c'est-à-dire le risque qu'un ou plusieurs emprunteurs ne soient plus en capacité de rembourser. Des crédits plus risqués conduisent les banques à augmenter les taux d'intérêt pour couvrir les pertes occasionnées par d'éventuels défauts de paiement. Et plus le risque s'accroît, plus les taux d'intérêt augmentent. La hausse des taux d'intérêt finit par freiner la demande de crédit et donc la progression de la demande. Les prix commencent alors sinon à baisser, du moins à stopper leur progression. Mais tous les emprunteurs qui avaient misé sur la hausse du prix des biens et services qu'ils vendent ou dont ils font le commerce se retrouvent dans l'incapacité de rembourser. Les faillites d'entreprises commencent à se multiplier, entraînant des défauts de paiement de plus en plus fréquents.

Si l'inflation rentabilise les demandes d'emprunt, elle accroît donc progressivement le risque de défaut, c'est-à-dire le risque qu'un ou plusieurs emprunteurs ne soient plus en capacité de rembourser. Des crédits plus risqués conduisent les banques à augmenter les taux d'intérêt pour couvrir les pertes occasionnées par d'éventuels défauts de paiement. Et plus le risque s'accroît, plus les taux d'intérêt augmentent.

La hausse des taux d'intérêt finit par freiner la demande de crédit et donc la progression de la demande. Les prix commencent alors sinon à baisser, du moins à stopper leur progression. Mais tous les emprunteurs qui avaient misé sur la hausse du prix des biens et services qu'ils vendent ou dont ils font le commerce se retrouvent dans l'incapacité de rembourser. Les faillites d'entreprises commencent à se multiplier, entraînant des défauts de paiement de plus en plus fréquents.

3.4. La hausse des taux d'intérêt provoque la récession.

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Le développement des faillites d'entreprises, en générant des licenciements et du chômage, va généraliser la baisse des revenus, mettant en difficulté également les ménages emprunteurs, notamment ceux qui ont emprunté pour acheter leur logement. Cette baisse des revenus et ces difficultés financières des ménages vont ralentir encore plus la demande, et même la faire baisser à tel point que cette fois c'est la production qui va devenir trop abondante, entraînant une baisse des prix des biens et services, surtout dans les secteurs les plus spéculatifs. Le mécanisme du crédit bancaire va encore amplifier le mouvement : plus la demande se contracte, plus les prix baissent, plus les défauts de paiement se multiplient, et plus le crédit devient risqué, ce qui pousse les banques à accroître les taux d'intérêt de façon vertigineuse, et même à arrêter leurs opérations de prêts. Mais cette brutale restriction du crédit empêche également toute accroissement de la demande, donc tout retour de la croissance et maintient l'économie dans la récession. Cette situation se prolonge tant que les banques restent exposées au risque, c'est-à-dire tant qu'elles ont encore des crédits à recouvrer auprès d'emprunteurs menacés de faillite ou de baisse de leurs revenus. Ce processus d'assainissement du secteur financier peut durer plusieurs années, à moins qu'un facteur extérieur ne vienne accroître la demande et les revenus.

Le développement des faillites d'entreprises, en générant des licenciements et du chômage, va généraliser la baisse des revenus, mettant en difficulté également les ménages emprunteurs, notamment ceux qui ont emprunté pour acheter leur logement. Cette baisse des revenus et ces difficultés financières des ménages vont ralentir encore plus la demande, et même la faire baisser à tel point que cette fois c'est la production qui va devenir trop abondante, entraînant une baisse des prix des biens et services, surtout dans les secteurs les plus spéculatifs.

Le mécanisme du crédit bancaire va encore amplifier le mouvement : plus la demande se contracte, plus les prix baissent, plus les défauts de paiement se multiplient, et plus le crédit devient risqué, ce qui pousse les banques à accroître les taux d'intérêt de façon vertigineuse, et même à arrêter leurs opérations de prêts. Mais cette brutale restriction du crédit empêche également toute accroissement de la demande, donc tout retour de la croissance et maintient l'économie dans la récession.

Cette situation se prolonge tant que les banques restent exposées au risque, c'est-à-dire tant qu'elles ont encore des crédits à recouvrer auprès d'emprunteurs menacés de faillite ou de baisse de leurs revenus. Ce processus d'assainissement du secteur financier peut durer plusieurs années, à moins qu'un facteur extérieur ne vienne accroître la demande et les revenus.

3.5. La crise des subprimes peut illustrer en partie la logique du cycle du crédit

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Avant que n’éclate cette crise des subprimes en 2007 aux E.U, au début des années 2000, le prix des logements augmentait, signe de la bonne tenue de ce marché qui attirait des acheteurs. Les banques ont participé à ce mouvement en accordant des prêts pour l’achat de logement. Si leur confiance en la capacité de remboursement n’était pas totale, elles avaient la possibilité de se faire rembourser en devenant propriétaire du logement en question (prêts hypothécaires). Or, comme le prix du logement augmentait, elles pouvaient anticiper un gain lors de la revente au cas où les emprunteurs n'auraient pas pu rembourser. Sur le marché, cette hausse de la demande s’est traduite par une hausse des prix toujours plus grande, enrichissant les ménages qui ont pu obtenir d’autres crédits, gagés sur la valeur de leur logement qui augmentait. C’est la phase de croissance accélérée grâce au crédit. Face à cet emballement, les taux d’intérêt commencent à augmenter et l’achat de logement devient plus coûteux : en 2006, le marché immobilier se retourne et les prix de l’immobilier finissent par baisser. Les banques qui avaient misé sur la poursuite de la hausse voient les risques de non remboursement ne plus être couverts par la valeur des logements : les prêts diminuent et avec eux la demande de nouveaux logements, ce qui accélère la baisse des prix et les difficultés de ce marché. On voit par cet exemple le rôle amplificateur des banques à la hausse comme à la baisse de l’activité. Si on retrouve donc bien l'idée de cycle du crédit, la crise des subprimes a été bien plus importante. Elle n'a pas vraiment accompagné et amplifié des fluctuations qui existaient déjà, elle en a été largement à l'origine notamment après la phase de retournement du marché immobilier. Les banques ont entraîné l'ensemble de l'économie (et pas seulement américaine, vous le savez sans doute) dans une "crise" économique aussi importante que celle de 1929.

Avant que n’éclate cette crise des subprimes en 2007 aux E.U, au début des années 2000, le prix des logements augmentait, signe de la bonne tenue de ce marché qui attirait des acheteurs. Les banques ont participé à ce mouvement en accordant des prêts pour l’achat de logement. Si leur confiance en la capacité de remboursement n’était pas totale, elles avaient la possibilité de se faire rembourser en devenant propriétaire du logement en question (prêts hypothécaires). Or, comme le prix du logement augmentait, elles pouvaient anticiper un gain lors de la revente au cas où les emprunteurs n'auraient pas pu rembourser.

Sur le marché, cette hausse de la demande s’est traduite par une hausse des prix toujours plus grande, enrichissant les ménages qui ont pu obtenir d’autres crédits, gagés sur la valeur de leur logement qui augmentait. C’est la phase de croissance accélérée grâce au crédit.

Face à cet emballement, les taux d’intérêt commencent à augmenter et l’achat de logement devient plus coûteux : en 2006, le marché immobilier se retourne et les prix de l’immobilier finissent par baisser. Les banques qui avaient misé sur la poursuite de la hausse voient les risques de non remboursement ne plus être couverts par la valeur des logements : les prêts diminuent et avec eux la demande de nouveaux logements, ce qui accélère la baisse des prix et les difficultés de ce marché. On voit par cet exemple le rôle amplificateur des banques à la hausse comme à la baisse de l’activité.

Si on retrouve donc bien l'idée de cycle du crédit, la crise des subprimes a été bien plus importante. Elle n'a pas vraiment accompagné et amplifié des fluctuations qui existaient déjà, elle en a été largement à l'origine notamment après la phase de retournement du marché immobilier. Les banques ont entraîné l'ensemble de l'économie (et pas seulement américaine, vous le savez sans doute) dans une "crise" économique aussi importante que celle de 1929.