ATTENTION :

ce cours correspond au programme de 2013, il n'est pas conforme au programme de terminale de SES en vigueur depuis 2019.

Synthèse CH06. Comment analyser la structure sociale ? (Attention : programme précédent)

Vous avez vu en classe de première que toutes les sociétés sont constituées de groupes sociaux. Ces groupes ne sont pas juxtaposés les uns à côté des autres, ils sont hiérarchisés et entretiennent donc des relations marquées par la domination de certains. Plus largement, ils sont marqués par des différences voire des inégalités. Nous pouvons donc dire que l’organisation de la société repose sur des systèmes de différenciation sociale basés sur une distribution inégale des ressources et des positions, c’est-à-dire dans l’accès aux ressources matérielles (les richesses produites) mais aussi accès au savoir, au pouvoir, au prestige. C’est ce que présenterons dans une première partie. Puis nous montrerons comment les sociologues du XIXe siècle mais aussi plus récents comprennent l’existence de ces groupes sociaux qu’ils nomment souvent classes sociale et dont la base est souvent le statut professionnel. Enfin, nous aborderons d’autres critères de différenciation que l’appartenance socioprofessionnelle comme l’âge, le sexe et le style de vie. Nous nous serons en effet rendus compte des transformations profondes des sociétés depuis le XIXe siècle qui complexifient les critères de hiérarchisation sociale.

Vous avez vu en classe de première que toutes les sociétés sont constituées de groupes sociaux. Ces groupes ne sont pas juxtaposés les uns à côté des autres, ils sont hiérarchisés et entretiennent donc des relations marquées par la domination de certains. Plus largement, ils sont marqués par des différences voire des inégalités. Nous pouvons donc dire que l’organisation de la société repose sur des systèmes de différenciation sociale basés sur une distribution inégale des ressources et des positions, c’est-à-dire dans l’accès aux ressources matérielles (les richesses produites) mais aussi accès au savoir, au pouvoir, au prestige. C’est ce que présenterons dans une première partie.

Puis nous montrerons comment les sociologues du XIXe siècle mais aussi plus récents comprennent l’existence de ces groupes sociaux qu’ils nomment souvent classes sociale et dont la base est souvent le statut professionnel.

Enfin, nous aborderons d’autres critères de différenciation que l’appartenance socioprofessionnelle comme l’âge, le sexe et le style de vie. Nous nous serons en effet rendus compte des transformations profondes des sociétés depuis le XIXe siècle qui complexifient les critères de hiérarchisation sociale.

1. Les sociétés modernes sont structurées par de nombreuses inégalités

1.1. Les inégalités économiques ne se réduisent pas aux inégalités de salaire.

1.1.1. Les inégalités de salaire en France.

Il y a en France, comme dans toutes les sociétés, des inégalités de salaires entre individus. Elles dépendent d’abord de la « valeur » que la société attribue aux différents postes, haut ou bas, de la hiérarchie du travail. Ces différences de salaire peuvent s’expliquer par les différences de mérite, de productivité, de responsabilité, etc. Elles dépendent aussi du rapport de force entre les salariés et leurs employeurs : certaines professions, par exemple parce qu’elles sont, à un moment donné, très demandées, obtiennent des salaires plus élevés.

Globalement, il semble que les 10 % des salariés à temps complet qui gagnaient les salaires les plus élevés gagnent environ 3 fois plus que les 10 % de salariés qui percevaient les salaires les plus faibles ou, de manière plus rigoureuse, le salaire minimum des 10 % les mieux rémunérés était 3 fois plus élevé que le salaire maximum des 10 % des moins bien rémunérés. Toutefois, ces écarts s’accroissent si l’on tient compte des salariés à temps partiels, des personnes percevant des allocations chômage. De plus, un économiste comme T. Piketty a bien montré que ce rapport D9/D1 minore singulièrement les inégalités : en effet, à l’intérieur de ces tranches de 10 %, il y a une forte inégalité. Ainsi, dans le dernier décile, les salaires montent très haut (le dernier centile, le 1 % des salariés les plus payés, dispose de plus de 7 500 € par mois).

1.1.2. Les inégalités de revenu en France

Prenons maintenant en compte l’ensemble des revenus : l’écart entre les revenus est plus fort que l’écart entre les salaires. Utilisons ici les statistiques portant sur les niveaux de vie (reportez-vous à la notion « revenu » et sachant que le niveau de vie divise le revenu par le nombre d’individus dans le ménage en sachant que du fait des économies d’échelle chaque individu ne compte pas pour un : voir sur le site de l’INSEE ici pour plus de détails). Le rapport inter-décile, qui est, rappelons-le aussi, le rapport entre le revenu minimum des 10 % des ménages ayant les revenus les plus élevés et le revenu maximum des 10 % des ménages ayant les revenus les plus faibles, est un peu plus élevé que celui qui ne concerne que les salaires, de l’ordre de 3,5. Cela s’explique aisément. En effet, les 10 % des ménages ayant les revenus les plus élevés ont, en général, un patrimoine plus important (qu’ils ont accumulé avec leur capacité d’épargne plus grande) et ont donc des revenus du patrimoine bien plus élevés que les autres ménages : ils concentrent une grande part des dividendes versés, loyers reçus, intérêts perçus de placements antérieurs. Là encore, c’est au sein de ces 10 % des ménages ayant les revenus les plus élevés que les inégalités sont les plus fortes.

1.1.3. Comment qualifier ces inégalités de revenu ?

Mais peut-on dire que inégalités sont fortes, faibles ? Pour cela, il nous faut faire des comparaisons dans le temps et l’espace. S’il semble que les inégalités de revenu se soient fortement réduites en France depuis le début du XXe siècle mais que cette réduction se soit stabilisée depuis le début des années 80 et voire même inversée. Là encore, c’est au sein des catégories ayant les revenus les plus élevés que les inégalités se sont accrues (les « 1 % »).

Les comparaisons internationales semblent indiquer que la France sans être un pays égalitaire comme peuvent être qualifiés les pays nordiques (Danemark, la Norvège, la Finlande et la Suède), elle en est relativement proche. À l’inverse, les pays anglo-saxons (États-Unis, Royaume-Uni) ou des pays d’Amérique latine connaissent de bien plus fortes inégalités de revenu qu’'en France et qui ont d’ailleurs à s’accroître notamment aux États-Unis depuis 45 ans environ.

1.1.4. Des inégalités de patrimoine bien plus importantes

Pour le patrimoine, on observe qu’une grande partie de la population ne dispose pratiquement d’aucun patrimoine. Ainsi, en 2010, les 40 % des ménages les plus pauvres (presque la moitié de la population française quand même !) possèdent, tous ensemble, 2 % du patrimoine total existant en France. Les 10 % des ménages les plus riches en possèdent 48 %. Dans ces conditions, il devient difficile de mesurer un écart Il vaut mieux parler de gouffre ! Le patrimoine provient de l’épargne des individus. Or, la capacité d’épargne augmente plus vite que le revenu : une personne qui gagne 1 000 € par mois en consommera, disons, 950 et aura donc 50 € d’épargne ; tandis qu’une personne gagnant 2 000 € par mois, parce que ses besoins sont bien satisfaits, consommera une moins grande part de son revenu et pourra épargner proportionnellement plus, mettons 400 €. Le rapport entre les deux montants d’épargne est de 1 à 8 quand le rapport entre les revenus n’est que de 1 à 2. Cela explique en partie pourquoi les inégalités de patrimoine sont nécessairement plus fortes que les inégalités de revenus. Ces dernières années, les inégalités de patrimoine ont fortement augmenté.

Cette forte augmentation des inégalités de patrimoine renforce évidemment l’inégalité des revenus car le patrimoine génère des revenus (loyers, dividendes, etc.).

1.2. Les inégalités sociales ne sont pas seulement la conséquence des inégalités économiques.

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Les inégalités sociales peuvent être la conséquence des inégalités économiques : par exemple, les inégalités quant à la taille ou au confort des logements découlent bien naturellement d’inégalités de revenus. Cependant, il y a des inégalités qui ne sont pas la conséquence d’un écart de revenu ou de patrimoine, c’est-à-dire que la société valorise des différences autres qu’économiques. Nous allons en donner deux exemples. Tout d’abord, les inégalités devant la mort. Alors même que l’accès aux soins médicaux est garanti à tous (en France, toujours), on meurt plus jeune quand on est ouvrier non qualifié que quand on est cadre. L’espérance de vie est moins longue chez les ouvriers que chez les cadres (aujourd’hui, l’espérance de vie à 35 ans est de 49 ans pour les hommes cadres et de 42,6 ans pour les hommes ouvriers d’après l’Insee). L’écart est encore plus grand si l’on prend l’espérance de vivre en bonne santé, c’est-à-dire sans affection invalidante, autrement dit les cadres vivent plus longtemps et en meilleure santé. Rappelons aussi que les femmes ont une espérance de vie plus élevée que les hommes alors qu’elles ont souvent revenus plus faibles que les hommes. Ensuite les inégalités scolaires que nous approfondiront dans un autre chapitre. L’école est, en France, publique et gratuite donc accessible à tous également. Pourtant, la nature des études, leur durée, le niveau de diplôme atteint sont assez nettement corrélés avec l’origine sociale. Les statistiques du Ministère de l’Éducation nationale (dans un rapport publié en 2010) montrent par exemple que, pour les enfants entrés en 6e en 1995 (ils ont donc passé le bac en 2002 ou 2003), 40,7 % des enfants d’ouvriers non qualifiés ont eu un bac quel qu’il soit (général, technologique ou professionnel) alors que les enfants de cadres supérieurs sont 87,6 % à être dans cette situation. Encore faut-il ajouter qu’il y a une grande inégalité dans le type de bac obtenu : les enfants d’ouvriers se répartissent à peu près également entre les trois filières alors que les enfants de cadres ont pour les ¾ un bac de la filière générale qui donne accès à des formations plus valorisées ensuite sur le marché du travail. Ces inégalités de réussite scolaire peuvent s’expliquer en partie par des différences de revenus entre les familles (certaines pouvant financer, par exemple, des cours particuliers, alors que d’autres ne le peuvent pas), mais ce n’est pas l’explication essentielle : le rapport de l’OCDE a confirmé que le système scolaire français, par ses attentes, son organisation, ses exigences sélectives, favorisaient les enfants issus de familles disposant d’un capital socio-culturel élevé.

Les inégalités sociales peuvent être la conséquence des inégalités économiques : par exemple, les inégalités quant à la taille ou au confort des logements découlent bien naturellement d’inégalités de revenus. Cependant, il y a des inégalités qui ne sont pas la conséquence d’un écart de revenu ou de patrimoine, c’est-à-dire que la société valorise des différences autres qu’économiques. Nous allons en donner deux exemples.

Tout d’abord, les inégalités devant la mort. Alors même que l’accès aux soins médicaux est garanti à tous (en France, toujours), on meurt plus jeune quand on est ouvrier non qualifié que quand on est cadre. L’espérance de vie est moins longue chez les ouvriers que chez les cadres (aujourd’hui, l’espérance de vie à 35 ans est de 49 ans pour les hommes cadres et de 42,6 ans pour les hommes ouvriers d’après l’Insee). L’écart est encore plus grand si l’on prend l’espérance de vivre en bonne santé, c’est-à-dire sans affection invalidante, autrement dit les cadres vivent plus longtemps et en meilleure santé. Rappelons aussi que les femmes ont une espérance de vie plus élevée que les hommes alors qu’elles ont souvent revenus plus faibles que les hommes.

Ensuite les inégalités scolaires que nous approfondiront dans un autre chapitre. L’école est, en France, publique et gratuite donc accessible à tous également. Pourtant, la nature des études, leur durée, le niveau de diplôme atteint sont assez nettement corrélés avec l’origine sociale. Les statistiques du Ministère de l’Éducation nationale (dans un rapport publié en 2010) montrent par exemple que, pour les enfants entrés en 6e en 1995 (ils ont donc passé le bac en 2002 ou 2003), 40,7 % des enfants d’ouvriers non qualifiés ont eu un bac quel qu’il soit (général, technologique ou professionnel) alors que les enfants de cadres supérieurs sont 87,6 % à être dans cette situation. Encore faut-il ajouter qu’il y a une grande inégalité dans le type de bac obtenu : les enfants d’ouvriers se répartissent à peu près également entre les trois filières alors que les enfants de cadres ont pour les ¾ un bac de la filière générale qui donne accès à des formations plus valorisées ensuite sur le marché du travail.

Ces inégalités de réussite scolaire peuvent s’expliquer en partie par des différences de revenus entre les familles (certaines pouvant financer, par exemple, des cours particuliers, alors que d’autres ne le peuvent pas), mais ce n’est pas l’explication essentielle : le rapport de l’OCDE a confirmé que le système scolaire français, par ses attentes, son organisation, ses exigences sélectives, favorisaient les enfants issus de familles disposant d’un capital socio-culturel élevé.

1.3. Les inégalités se cumulent parfois, rendant encore plus difficile leur réduction.

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Comme nous venons de le voir les inégalités scolaires peuvent avoir en partie une origine économique. Ces différences de réussite scolaire engendreront des différences d’accès aux professions les plus valorisées en termes de statut social et/ou économique. Ainsi, des inégalités économiques se reproduisent. De plus, elles se cumulent avec des inégalités sociales, l’influence du statut socioprofessionnel et du capital culturel associé se cumule avec celle des ressources économiques. Souvenez vous aussi du lien entre inégalités de revenu et inégalités de patrimoine : un revenu plus élevé entraîne une épargne plus importante et donc des placements financiers ou immobiliers qui engendrent des revenus supplémentaires, etc. Les inégalités de revenu et de patrimoine sont donc cumulatives… ce qui ne veut pas dire, bien sûr, que les inégalités de revenu ne dépendent aujourd’hui que des inégalités de patrimoine.

Comme nous venons de le voir les inégalités scolaires peuvent avoir en partie une origine économique. Ces différences de réussite scolaire engendreront des différences d’accès aux professions les plus valorisées en termes de statut social et/ou économique. Ainsi, des inégalités économiques se reproduisent. De plus, elles se cumulent avec des inégalités sociales, l’influence du statut socioprofessionnel et du capital culturel associé se cumule avec celle des ressources économiques.

Souvenez vous aussi du lien entre inégalités de revenu et inégalités de patrimoine : un revenu plus élevé entraîne une épargne plus importante et donc des placements financiers ou immobiliers qui engendrent des revenus supplémentaires, etc. Les inégalités de revenu et de patrimoine sont donc cumulatives… ce qui ne veut pas dire, bien sûr, que les inégalités de revenu ne dépendent aujourd’hui que des inégalités de patrimoine.