ATTENTION :
Lorsque les économistes s’intéressent à la croissance économique à long terme, ils mettent tout d’abord en évidence que le côté « offre » est important. (En première vous avez surtout étudié le côté demande). Qu’est-ce à dire ? Tout simplement que l’augmentation des quantités produites dépend des capacités de production. Il faut d’abord plus de travailleurs et plus de machines pour produire plus ce que les économistes néoclassiques résument par cette fonction de production :
Y = f(L, K) avec Y = quantités produites, L = nombre de travailleurs (ou d’heures de travail) et K = capital fixe utilisé.
Ainsi, pour que Y augmente, il faut que L ou K ou les deux augmentent.
La force de travail d’un pays, c’est sa population active, c’est-à-dire l’ensemble des personnes qui sont disponibles pour travailler – à l’exclusion, essentiellement, donc, des plus jeunes jusqu’à ce qu’ils sortent de formation, des plus âgés et de ceux qui font le choix de rester à la maison pour élever les enfants.
La taille de cette population active dépend d’abord des facteurs démographiques qui font s’accroître la population totale le nombre de jeunes arrivent sur le marché du travail par rapport au nombre de personnes âgées qui partent à la retraite. Elle dépend aussi des comportements d’activité des individus. Ainsi, l’allongement de la scolarité se traduit par de moindres entrées que possible sur le marché du travail ou la volonté des femmes à participer au marché du travail, au contraire, accroît le facteur travail et les capacités productives du pays.
Enfin, une baisse de la durée du travail induit, de manière directe, une baisse des capacités de production (sauf compensation bien sûr par d’autres conséquences indirectes comme l’embauche de nouveaux travailleurs) et cela quelle que soit le forme qu’elle prenne : allongement des congés payés, baisse de la durée hebdomadaire du travail (les 35 heures il y a quelques années en France), etc.
Le deuxième facteur de production, le capital (ou capital technique), est bien plus hétérogène encore que le travail puisqu’il regroupe aussi bien la pelle du terrassier que les bâtiments abritant les entreprises, les machines-outils comme les logiciels.
Lorsque les entreprises investissent en augmentant leur capital technique, elles le font pour accroître leur capacité de production, on parle parfois d’investissement de capacité (il y a simplement un changement de l’échelle de production). Ainsi, avec plus de capital, elles peuvent produire plus sans que l’on augmente la productivité du travail ou du capital.
Toutefois, les analyses chiffrées de ces facteurs laissent apparaître que, très souvent, l’augmentation des facteurs de production ne suffit pas à expliquer la totalité de la croissance : il reste un résidu de croissance inexpliquée.
Dès lors, les économistes néoclassiques vont améliorer leur modèle explicatif et essayer de trouver et de mesurer d’importance des facteurs plus qualitatifs à la croissance. On parle à ce stade de « progrès technique » en essayant de mesurer la productivité globale des facteurs et d’estimer son rôle dans la croissance économique.
Restons, pour l’instant, sur le rôle du capital. À côté du mécanisme très simple que l’on vient de voir, deux autres mécanismes plus complexes expliquent en quoi l’augmentation du facteur capital peut favoriser la croissance.
Le premier met en lien le capital et le travail puisque le travail ne se conçoit presque jamais sans un minimum d’équipement : bâtiment, outils, ordinateurs, bureaux, téléphones, véhicules… L’outil donne de la puissance au travailleur, les télécommunications accélèrent la transmission d’informations, les véhicules font économiser du temps de déplacement, etc. Plus la quantité de capital dont dispose chaque travailleur – le « capital par tête » – est importante, et plus le travailleur est efficace et donc productif. Donc, l’accroissement du capital par tête est source de croissance… dans certaines limites bien sûr : est-il utile, en termes de production supplémentaire, qu’une secrétaire ait trois téléphones et quatre ordinateurs ?
Le second met en évidence une modification du capital utilisé dans le processus de production. Le capital productif accroît l’efficacité du travail, mais l’évolution des techniques elles-mêmes donne aussi plus d’efficacité au capital productif. Le progrès technique change les outils que l’homme utilise en leur donnant plus de puissance (la machine à vapeur, par exemple, ou l’amélioration des capacités des ordinateurs) ou plus de précision (l’utilisation du Laser). On peut aussi dire que le progrès technique accroît la productivité du capital : avec un outil plus performant, on peut produire plus qu’avant.
Mais le progrès technique n’agit pas seulement au travers de la productivité du capital, il peut aussi transformer complètement les techniques de production pour les rendre plus efficaces. Ces « innovations de procédé », ainsi nommées par l’économiste J. Schumpeter, ne consistent pas en une amélioration technique d’un des outils utilisés par les travailleurs, ou par une compétence accrue de ces mêmes travailleurs, mais en une redéfinition complète de la façon de produire, en utilisant d’autres outils et d’autres compétences.
On peut prendre comme exemple le commerce en ligne qui révolutionne la distribution. Certes il y a à l’origine une innovation technique précise (internet), mais cette nouveauté technique conduit à transformer complètement le circuit commercial. A la place d’un réseau de magasins à proximité des clients, il faut désormais avoir un site internet bien repéré, facile d’emploi et à grosse capacité. Plutôt que des compétences commerciales et de contact avec le client, il importe surtout d’avoir une parfaite gestion des stocks et excellente logistique permettant de livrer les clients rapidement et sans erreur. D’un modèle à l’autre, on n’a pas « amélioré » les facteurs de production, on les a complètement changés.
Mais, l’innovation de procédé n’a pas forcément un dimension technologique, elle peut aussi être organisationnelle.
Une redéfinition des tâches à accomplir, une nouvelle répartition de ces tâches entre les salariés, de nouveaux modes de coordination entre les postes de travail, tout cela constitue une nouvelle organisation du travail, et celle-ci peut être source d’efficacité.