Segmentation du marché du travail

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Lexique

La segmentation du marché du travail est une analyse du marché du travail qui considère qu'il existe plusieurs marchés du travail qui fonctionnent de manière spécifique.

Définition

La segmentation du marché du travail est une analyse du marché du travail qui considère qu'il existe plusieurs marchés du travail qui fonctionnent de manière spécifique.

Très souvent, on distingue deux types de différenciation du fonctionnement des marchés du travail.

Tout d'abord, entre marché interne et marché externe. Le marché externe correspond à une affectation des emplois et à une détermination des salaires comme sur un marché concurrentiel : les postes à pourvoir se font selon des règles concurrentielles. À l'inverse, le marché interne correspond à une affectation des emplois et à une détermination des salaires selon des règles internes à l'entreprise ou à l'organisation ; la concurrence ne joue pas sur ce type de marché.

Ensuite entre marché primaire et marché secondaire. Sur le marché primaire se trouvent des emplois typiques (CDI à temps plein) occupés par des salariés qualifiés, plutôt bien rémunérés et jouissant de bonnes conditions de travail et de perspectives de promotion interne. Ce marché primaire se construirait autour des marchés internes propres à certaines entreprises. À l'inverse, sur le marché secondaire se trouvent surtout les emplois atypiques (temps partiel ou à durée déterminée), moins bien rémunérés et occupés souvent par des « minorités » (immigrés, jeunes, femmes, etc.).

Tendances

Depuis la fin de la seconde guerre mondiale, on peut distinguer deux grandes périodes : durant les 30 glorieuses, le travail salarié sous forme de CDI devient la norme. De plus, la faiblesse du chômage entraîne peu de licenciements et une intégration assez facile des jeunes qui arrivent sur le marché du travail. Le rôle des conventions collectives devient de plus en plus important. Ce sont les marchés internes du travail et primaires qui se développent.

Depuis cette période, il y a une tendance au développement d'emplois atypiques et notamment pour l'embauche des personnes souvent jeunes qui arrivent sur le marché du travail. Depuis une trentaine d'années, il semble que ces emplois atypiques soient de moins en moins fréquemment un « tremplin vers l'emploi stable et de plus en plus des situations récurrentes pour les salariés concernés, notamment dans les professions à CDD d’usage » (c'est-à-dire dans des professions qui ont le droit d'y recourir de manière normale du fait de la nature de leur activité :sportifs professionnels, intermittents du spectacle, etc.).

Ces tendances peuvent amener à une flexibilisation du marché du travail par l'extension des marchés externes et des marchés secondaires.

Enjeux

La thèse de la segmentation du marché du travail signifie que l’utilisation classique du modèle néoclassique doit être fait de manière nuancée car il n'y aurait plus d'homogénéité du travail. Si le marché secondaire est fréquent chez les femmes ou les minorités ethniques (aux États-Unis par exemple) et peu fréquent chez les hommes blancs et qualifiés, il faudrait différencier l'analyse. De même, comment étudier l'évolution des salaires si les marchés sont segmentés : la loi de l'offre et de la demande sur le marché du travail serait ainsi inopérante.

En ce qui concerne le passage d'un marché à un autre, l'enjeu n'est pas de nature théorique mais intéresse les salariés concernés. S'il est possible que les marchés externes ou primaires soit un premier pas vers les autres marchés plus protégés, l'inquiétude quant au développement des marchés externes pourrait être relativisée. Certains économistes pensent, en effet, que la dégradation du marché du travail touche tout le monde et qu'il n'y a pas la formation d'une strate d'actifs voués à des emplois précaires ; d'autres, à l'inverse, pensent que ces emplois se concentrent de plus en plus non pas sur certains types d'individus mais plutôt dans certains types de profession.

Dernier enjeu : les liens entre le chômage et la nature des marchés du travail. L'existence de marchés protégés (internes et primaires) impliqueraient que le chômage ne se distribue pas également entre les actifs. Il y aurait des salariés dans la grandes entreprise et la fonction publique qui seraient protégés de tout risque de chômage et de pression à la baisse sur les salaires (les « insiders ») et les autres, les « outsiders » qui subiraient seul les conséquences de la dégradation du marché du travail : risque accru de chômage et pression à la baisse sur les salaires.

Indicateurs

Il n'existe pas d'indicateurs spécifiques mais des indicateurs peuvent permettre d'identifier la nature des marchés du travail. Entre marché interne et marché externe, il peut s'agir de l'importance des emplois atypiques (intérimaires, CDD, etc.) mais aussi de l'importance des taux de rotation des emplois. De plus, pour la distinction entre marché primaire et marché secondaire, le niveau des salaires, les conditions de travail peuvent être des indicateurs très utiles aussi.

Erreurs Fréquentes

Mélanger ces notions !

Croire que les administrations publiques se caractérisent uniquement par l'importance d'un marché primaire et d'un marché interne important. En réalité, la précarité est très importante par rapport à l'ensemble des entreprises à côté d'un noyau très stable de fonctionnaires.

Croire qu'il y a une stricte équivalence entre marché externe et marché secondaire. Même si cela est vrai globalement, certains professionnels très qualifiés, très demandés peuvent bénéficier de la mise en concurrence qu'ils font des employeurs (grands « patrons », traders réputés, sportifs professionnels reconnus, etc.).